J’ai déjà eu l’occasion d’aborder le sujet : avec un peu plus de 593 milliards d’euros en 2010, la production de notre industrie manufacturière a augmenté de 140% par rapport à 1970 [1]. Au cours de ces 40 années, la valeur ajoutée générée par ce secteur de notre économie – c'est-à-dire la richesse économique qu’il crée chaque année – a plus que doublé [2]. En 2007/08, juste avant la crise, l’industrie manufacturière française avait même battu son record historique de production et de création de richesse. S’il y a bien eut un net recul dans l’industrie textile, il a été plus que largement compensé par d’autres branches comme – par exemple – les équipements électriques, les produits électroniques ou la cosmétique qui ont connu des croissances supérieures à 600%. Il n’y a donc rien, d’un point de vue absolu, qui ressemble de prêt ou de loin à une « désindustrialisation ».
Pourtant, les tenants de ladite désindustrialisation n’en démordent pas et soulignent que le poids de l’industrie dans notre économie a décliné ; conséquence selon eux des délocalisations vers des pays à bas salaires. En effet, la part de la valeur ajoutée de l’industrie manufacturière dans notre PIB est passée d’environ 22% en 1970 à quelque chose de l’ordre de 10% aujourd’hui [3]. Comme nous l’avons vu plus haut, cette évolution n’est pas liée à une réduction de la richesse créée par notre industrie mais à une augmentation plus rapide des activités non-industrielles – et en premier lieu des activités de services. Ce phénomène est bien réel mais il n’est pas lié à la mondialisation puisque – comme le souligne l’excellent Mark Perry – la même évolution s’observe à l’échelle mondiale : la part des industries manufacturières dans le Produit Mondial Brut est passée de près de 27% en 1970 à moins 17% de nos jours [3].
Cette « désindustrialisation relative » – c'est-à-dire la baisse du poids des industries dans nos économies – traduit principalement deux phénomènes : une révolution technologiques – qui nous a fait passer, au cours des dernières décennies, d’une économie des machines à une économie de la connaissance et de l’information – et un gigantesque mouvement d’externalisation des fonctions annexes – qui fait que la part de valeur ajoutée qui revient aux services de nettoyage industriels (par exemple) n’est plus comptabilisée dans l’industrie mais dans les services.
La désindustrialisation est donc bel et bien un mythe qui relève du biais cognitif – les fermetures d’usines font la « une » des journaux mais personne n’entends parler des créations d’emplois qui les compensent – et du marketing politique.
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[1] Insee – Production par branche aux prix de l'année précédente chaînés.
[2] Insee – Valeur ajoutée aux prix de l'année précédente chaînés .
[3] Nations Unies – GDP/breakdown at current prices in US Dollars.
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